« Luxembourg : Quelle résilience !
Comme nous le disions dans un article en décembre 2019, le Luxembourg poursuit son ascension. Malgré une crise sanitaire sans précédent, cette place financière est restée et reste active. Bravant toutes les contraintes, elle a comblé une bonne partie de son retard sur la digitalisation. Un des seuls sujets où elle apparaissait légèrement en retrait par rapport à d’autres places. Elle franchit les obstacles avec énergie et succès.
Nul doute que le Grand-Duché continuera à se distinguer dans l’univers si convoité de la banque privée ! »
– Antoine Aliotti
Bien avant le Covid-19, le Luxembourg a su se positionner comme une Place de premier choix pour les banques privées cherchant un accès au marché européen. Le Brexit n’a fait que renforcer cette tendance. La crise du coronavirus, elle, a accéléré la digitalisation de la banque privée et sa disponibilité de tous les instants pour une clientèle internationale.
Depuis 10 ans, le secteur de la banque privée au Luxembourg connaît une croissance constante et significative. Alors que 228 milliards d’euros étaient gérés par ce secteur en 2008, on en comptait en effet 395 milliards à la fin de l’année 2018.
Cette évolution, la banque privée la doit avant tout à une clientèle internationale, attirée par les atouts de la Place luxembourgeoise. «Il est clair que si on doit se pencher sur les spécificités du Luxembourg par rapport à d’autres places financières, son caractère international constitue incontestablement sa principale différence», explique Fabio Mandorino, senior adviser – Member Relations au sein de l’ABBL (Association des banques et banquiers, Luxembourg). «Le marché local étant trop restreint, le Luxembourg a en effet toujours été tourné vers l’extérieur. Et c’est finalement devenu sa marque de fabrique.»
Les atouts du Luxembourg
Au fil des années, et notamment suite à d’importantes crises financières, le Luxembourg a su se présenter aux yeux des investisseurs internationaux comme une place financière solide, particulièrement résiliente et disposant de nombreux atouts.
«La notation triple A que nous obtenons depuis de très nombreuses années contribue certainement à rassurer la clientèle internationale de nos banques privées», estime Fabio Mandorino. «Mais au-delà de la sécurité qu’il offre aux investisseurs, le Luxembourg dispose aussi d’un savoir-faire qui fait la différence. Le multilinguisme, par exemple, est la règle dans notre pays, alors que ce n’est pas le cas partout.»
Cette concentration de banques privées à Luxembourg permet de donner une réelle crédibilité à la Place: les meilleurs sont ici, et cela rassure beaucoup la clientèle.
Outre ces compétences, le Grand-Duché dispose aussi d’un atout de taille par rapport à son principal concurrent, la Suisse: son passeport européen. Une banque installée au Luxembourg peut ainsi exercer ses activités dans tout autre État membre de l’Union européenne.
«C’est la raison pour laquelle de grandes banques suisses s’installent au Luxembourg. Elles gèrent leur clientèle locale en Suisse et leurs clients internationaux depuis le Grand-Duché», poursuit Fabio Mandorino.
Le Brexit a encore renforcé cette position de hub européen du Luxembourg, puisque certaines institutions ont quitté la City pour rejoindre le Grand-Duché et sécuriser ainsi leur accès au marché européen. «Cette concentration de banques privées à Luxembourg permet de donner une réelle crédibilité à la Place: les meilleurs sont ici, et cela rassure beaucoup la clientèle», ajoute le conseiller de l’ABBL.
Tout-en-un
L’expertise internationale de la banque privée luxembourgeoise permet aux banquiers de gérer des questions complexes et des portefeuilles contenant des biens présents sur plusieurs juridictions européennes. Ces conseillers bancaires peuvent aussi offrir à chaque client un ensemble de services pour le moins pléthorique.
«C’est ce que l’on appelle la ‘boîte à outils’ luxembourgeoise», indique Fabio Mandorino. «Si un client vient pour un conseil sur son patrimoine, il pourra aussi trouver des réponses pour de la philanthropie, des assurances, la planification de sa succession, etc. Certes, nous n’avons pas les montagnes et les lacs de la Suisse, mais on trouve au Luxembourg tous les services et produits possibles!»
Nous avons organisé des workshops avec la CSSF et nous avons pu établir un rapport commun dans lequel nous indiquions de façon commune les efforts consentis par le secteur ces dernières années.
Il faut enfin répéter combien la collaboration entre le secteur de la banque privée et l’organe de régulation local, la Commission de surveillance du secteur financier (CSSF), est bonne et constante. «Nous l’avons encore vu dernièrement lorsque nous avons préparé la visite des émissaires du Gafi: nous avons organisé des workshops avec la CSSF et nous avons pu établir un rapport commun dans lequel nous indiquions de façon commune les efforts consentis par le secteur ces dernières années», explique Fabio Mandorino.
Une accélération technologique
Il reste que le secteur ne peut pas vivre sur ses acquis. Régulièrement, le contenu de la boîte à outils luxembourgeoise est réévalué et adapté afin d’assurer que l’avantage comparatif du Luxembourg reste pérenne. La veille technologique est aussi la règle dans le secteur, et l’adoption de nouveaux outils digitaux devrait connaître un bond considérable au cours des prochains mois.
«L’une des conclusions de l’étude sur la banque privée digitale que l’ABBL a menée l’année dernière en collaboration avec KPMG est que l’enjeu stratégique de la transformation numérique de la banque privée a été plus lent à se mettre en place au Luxembourg qu’ailleurs», reconnaît Fabio Mandorino. «La raison en est simple: notre pays accueille beaucoup de filiales d’institutions basées à l’étranger. Les décisions se prennent donc plutôt à Genève, Londres ou Paris, et il faut le temps que les décisions soient mises en pratique au Luxembourg.»
Je crois donc que si la crise doit avoir un impact durable sur le secteur de la banque privée, ce sera sans doute dans l’organisation du travail, la digitalisation du contact avec le client.
La crise du Covid-19 devrait toutefois mettre un grand coup d’accélérateur à tous les projets de digitalisation qui avaient été lancés. «Du jour au lendemain, les banques ont dû s’adapter, en mettant notamment une grande partie de leur personnel en télétravail. Et cela s’est parfaitement bien passé», estime Fabio Mandorino. «Dans un contexte de crise, où les marchés étaient bousculés, les clients ont apprécié d’avoir toujours un contact privilégié et régulier avec leur conseiller bancaire, même par vidéoconférence. Je crois donc que si la crise doit avoir un impact durable sur le secteur de la banque privée, ce sera sans doute dans l’organisation du travail, la digitalisation du contact avec le client. On voit en effet avec ces outils que le rapport humain – essentiel dans notre secteur – est assuré et que la disponibilité du conseiller bancaire est encore renforcée. Ce n’est donc que du positif.»
Avec une clientèle disséminée partout dans le monde, la banque privée luxembourgeoise a en effet tout à gagner à élargir, dès maintenant, ses capacités à maintenir le contact à distance avec ses clients.
Source: Paperjam.lu